Sport et humanités

Séminaire « Sport et Humanités » dirigé par Isabelle Queval

Programme 2015-2016 :

  • 12 Octobre 2015 : Jean-Paul Callède
  • 16 Novembre 2015 : Marc Lévêque
  • 14 décembre 2015 : Jean-Michel Besnier
  • 1er Février 2016 : Patrick Mignon
  • 14 Mars 2016 : Pierre-Frédéric Daled
  • 4 Avril 2016 : Anaïs Bohuon

Le séminaire se tient le lundi de 14h30 à 16h30, en Salle des thèses, à l’université de Paris Descartes, 5è étage du bâtiment Jacob, 45 rue des Saints-Pères, 75006 Paris.

L’objet de ce séminaire est d’explorer ce qui relie le « sport » aux « humanités » dans leur acception la plus classique, autant que dans les perspectives les plus contemporaines des sciences humaines. On peut aborder la question du sport par de multiples angles, en particulier historiques et sociologiques, mais bien évidemment aussi philosophiques, éthiques, économiques, médicaux, pédagogiques ou psychologiques, justifiant le statut du sport aujourd’hui comme étant celui d’un « fait social total » ; pour cette raison, il semble nécessaire de tracer les lignes directrices d’une réflexion qui trouve écho dans une approche plus large de l’« humain », en particulier au travers de la question du corps.

Programme et note d'intention 15-16 Sports et Humanites

A propos de l'intervention de Anaïs BOHUON le 4 avril 2016

"Contrôler le sexe des sportives : du muscle aux hormones sexuelles"

Cette conférence vise à analyser d’un point de vue socio-historique les tests de féminité, des contrôles médicaux instaurés dès 1966, visant à empêcher les hommes de concourir au sein des compétitions internationales féminines. Face à des athlètes qui bouleversent la représentation d’une construction binaire entre le sexe masculin et le sexe féminin, le monde sportif tente de maintenir une bicatégorisation sexuée inhérente à la logique interne de principe de compétitions.

Cette communication a pour ambition de revisiter l’histoire sociale et politique des « contrôles de féminité » et de montrer en quoi ils constituent un véritable dispositif de domination. Je reviendrai plus précisément sur la suppression « symbolique » du test depuis 2000. Dorénavant, les autorités s’appuient sur une appréciation esthétique et visuelle des corps féminins et elles n’appliquent plus le test, de façon systématique et obligatoire. Ce changement est à l’origine d’une actualité sportive brûlante, marquée par la suspension de la Sud-Africaine Caster Semenya. Cette affaire révèle la frontière mouvante subjectivement tracée entre le masculin et le féminin, encore plus floue quand les « marqueurs de la race et de la classe » interfèrent avec les « marqueurs du sexe ».

ANAÏS BOHUON est Maîtresse de conférences à l’UFR STAPS de Paris Sud 11, Laboratoire Sports, Politiques et Transformations Sociales (J.E 2496)

A propos de l'intervention de Pierre-Frédéric Daled le 14 mars 2016

« “ Aussi sot qu’un athlète malade ”. Les corps possibles selon Canguilhem »

On ne peut manquer de relever de nos jours un paradigme insistant en termes de santé privée et de médecine du sport : l’amélioration de nos capacités naturelles. Notre corps serait-il obsolète ? La « normalité d'aujourd’hui » serait-elle devenue le « handicap de demain » ? Notre corps doit-il être un site d’expérimentation (sportive) afin de le remodeler ? Mais en fonction de quelle « humanité » ou de quel idéal corporel ?

Et d’abord qu’est-ce qu’un corps normal ? Qu’est-ce qu’un corps pathologique ? Qu’est-ce qu’un corps valide ou invalide ? Peut-on fixer objectivement la frontière ? Ensuite qu’est-ce qu’un corps amélioré ? Comment l’améliorer : effort « naturel », techno-sciences, tricherie ? Et fondamentalement quel rapport à notre corps ce remodelage impliquerait-il ?

Sur ces thèmes d’actualité, primo, nous évoquerons trois cas réels qui interpellent les frontières censées fixer des notions telles que normal, valide, humanité, etc. Nous suggérerons ensuite un cas fictif. Secundo, nous évoquerons deux types de conception de notre rapport au corps humain émis entre le XVIIIe siècle et le XXIe siècle. Tertio, pour finir, nous rappellerons les réflexions prémonitoires proposées dès 1943, 1951 et 1962 par le philosophe et médecin français Georges Canguilhem (1904-1995) quant à notre rapport au corps. Anticipant dès le milieu du XXe siècle des défis très contemporains, celles-ci permettraient d’envisager avec flexibilité, mais sans relativisme, une libre conception des corps possibles.

Publications récentes en rapport avec la communication :

· « Normal, anormal et anomal », dans Gilbert Hottois, Jean-Noël Missa et Laurence Perbal (dir.),Encyclopédie du trans/posthumanisme. L'humain et ses préfixes, Paris, Vrin, « Pour demain », 2015,  p. 86-93.

· « Normal et pathologique », dans Gilbert Hottois, Jean-Noël Missa et Laurence Perbal (dir.), Encyclopédie du trans/posthumanisme. L'humain et ses préfixes, op. cit.,  p. 93-106.

· « Surhomme », dans Gilbert Hottois, Jean-Noël Missa et Laurence Perbal (dir.), Encyclopédie du trans/posthumanisme. L'humain et ses préfixes, op. cit., p. 139-146.

· « Superman », dans Gilbert Hottois, Jean-Noël Missa et Laurence Perbal (dir.), Encyclopédie du trans/posthumanisme. L'humain et ses préfixes, op. cit.,  p. 432-438.

· « Tératologie », dans Gilbert Hottois, Jean-Noël Missa et Laurence Perbal (dir.), Encyclopédie du trans/posthumanisme. L'humain et ses préfixes, op. cit., p. 146-155.

· « Contraindre pour le bien. Approches éthiques », dans Science et sports. Journal des sciences de l’homme en mouvement, Organe officiel de la Société française de médecine du sport, Paris, Elsevier-Masson, vol. 26, n° 3, juin 2011, p. 119-126.

· « Actualité de la bioéthique », dans Pierre Daled & Jacques Lemaire (éd.), Réflexions sur la bioéthique, La Pensée et les Hommes, n° 74 , Bruxelles, Éditions Espace de Libertés, 2009, p. 13-37.

·  « Santé, folie et vérité aux XIXe et XXe siècles : Nietzsche, Canguilhem et Foucault », dans Pierre Daled (éd.), L’Envers de la raison. Alentour de Canguilhem, Annales de l’Institut de philosophie de l’Université de Bruxelles, Paris, Vrin, 2008, p. 115-140.

· " Le sujet en tant que fiction et déplacement chez Canguilhem : une éthique épistémologique », dans Marie-Geneviève Pinsart (éd.), Narration et Identité. De la philosophie à la bioéthique, Paris, Vrin, 2008, p. 61-78.

Par ailleurs, Pierre F. Daled termine un ouvrage, biographique et théorique, consacré à Georges Canguilhem (1904-1995). Au travers de ses archives inédites, il retrace l’ensemble de ses réflexions sur le normal, le pathologique, la santé, la maladie, mais aussi sur l’erreur et l’anomalie, à partir des années de formation à l’Ecole Normale Supérieure (1924-1927) jusqu’à sa conférence strasbourgeoise de 1988. Une large place y est consacrée à la reconstitution de ses activités de Résistance indissociables de sa publication fondamentale de 1943 : l’Essai sur quelques problèmes concernant le normal et le pathologique.

Pierre-Frédéric Daled, Professeur à l’Université libre de Bruxelles (ULB), Docteur en philosophie et lettres (ULB), Chercheur au Centre de Recherches Interdisciplinaires en Bioéthique (CRIB) de l’ULB, Ancien Membre du Comité consultatif belge de bioéthique (2010-2014)

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