Le 16 novembre 2020 – Soutenance de thèse d’Hugo Bret

Soutenance de thèse d'Hugo Bret: "Le bas de l’échelle ? Enquête sur la condition professionnelle et sociale des éboueurs et des balayeurs du secteur public en région parisienne".

Thèse soutenue le 16 novembre 2020.

Composition du jury :

  • Marie CARTIER, professeure de sociologie à l’Université de Nantes.
  • Pierre FOURNIER, professeur de sociologie à l’Université d’Aix-Marseille.
  • Anne LAMBERT, chargée de recherche à l’Institut National d’Etudes Démographiques.
  • Jean-Noël RETIERE, professeur émérite de sociologie à l’Université de Nantes (rapporteur).
  • Olivier SCHWARTZ, professeur émérite de sociologie à l’Université de Paris (directeur).
  • Florence WEBER, professeure de sociologie à l’Ecole Normale Supérieure de Paris (rapporteur).

Résumé de la thèse :

A partir d’une enquête de type ethnographique, cette thèse interroge, au croisement d’une sociologie du travail et des classes populaires, une condition professionnelle et sociale encore peu explorée : celle des éboueurs et des balayeurs du secteur public, à Paris et en région parisienne. Tandis que les milieux populaires ont été traversés par des évolutions structurelles majeures, un processus de déprolétarisation a conduit à transformer ce « sale boulot » en « bon plan » sur le marché du travail non qualifié pour des classes populaires désireuses de se stabiliser en entrant dans la fonction publique « par le bas ». Que veut dire être éboueur ou balayeur dans le secteur public aujourd’hui ? Que veut dire être stable, mais en « bas » de l’échelle professionnelle ? S’intéressant d’abord aux conditions de travail, la thèse montre que les bénéfices de l’emploi public s’étendent aux situations concrètes de travail, le secteur public pouvant représenter une alternative pour se soustraire aux contraintes du secteur privé. Elle rend également compte de la « tertiarisation » du secteur : la dimension relationnelle du métier a été renforcée et les agents sont aujourd’hui plus qu’hier des « ouvriers des services ». L’enquête parvient ensuite à éclairer la diversité interne du groupe en mettant en évidence l’espace des différences sociales en son sein. La thèse souligne la pluralité des rapports au travail, la diversité des usages ou fonctions de l’emploi public et les effets de ce dernier sur les trajectoires et les modes de vie. Ainsi, l’accès à la fonction publique peut autoriser une stabilisation voire une promotion sociale et le travail, positivement investi, est susceptible d’être considéré comme un véritable métier. Mais lorsqu’il est jugé indésirable, le travail peut aussi être vécu en négatif par des personnes qui se sentent captives de leur emploi ou en décalage par rapport à leur situation professionnelle. En montrant que ces divergences sont liées à des écarts en termes de trajectoires, de générations, de ressources, d’aspirations et de styles de vie, la thèse identifie des pôles de travailleurs et met au jour une stratification au sein du groupe. Enfin, l’enquête étudie les rapports concrets que ces ouvriers entretiennent, dans le cadre de leur travail, avec des groupes sociaux situés « au-dessous » et « au-dessus » d’eux. Cette démarche permet de décrire empiriquement une condition ambivalente, caractérisée par la subalternité, une relative sécurité économique ainsi qu’un certain degré de participation sociale, mais aussi des formes de vulnérabilité. La thèse montre ainsi que la dualité qui caractérise la condition de ces travailleurs subalternes – stables et protégés, mais modestes donc fragiles – contribue à façonner des styles de vie et des propriétés culturelles à la croisée des classes populaires et des catégories intermédiaires. En appréhendant le salariat d’exécution au prisme de la stabilité et en mobilisant une sociologie du travail et des travailleurs, l’étude de ces ouvriers du public espère ainsi plus largement contribuer à l’exploration des fractions médianes – stables, mais modestes – des classes populaires contemporaines.

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