Philosophie de l’effort

Philosophie de l'effort, d'Isabelle Queval, éditions cecile defaut, novembre 2016.

Comment penser l’effort aujourd’hui ? Le thème peut sembler à la fois banal et faussement suranné. Banal, d’une part, parce que l’effort est, pour paraphraser Descartes, « la chose du monde la mieux partagée ». Depuis toujours, nous sommes enjoints à « faire des efforts », dans des domaines très variés de l’existence, pour apprendre à marcher ou faire du vélo, à l’école, dans nos relations avec autrui puis, plus tard, pour mener à bien des études et une vie professionnelle, trouver le bonheur dans notre vie privée et surmonter les « coups durs » qui sont le lot de chacun. Banal aussi, parce que, tel un marronnier des propos de comptoir, le thème est dans l’actualité, lorsqu’il s’agit de déplorer le « manque d’efforts » des « jeunes générations » ou la perte du « goût de l’effort », à l’école notamment. Ainsi, l’effort serait requis partout, et pourtant perdu, omniprésent dans les discours et si difficile à définir, si difficile à saisir aussi dans les actes. De quoi parle-t-on, de l’effort physique, démonstratif, ou de l’effort intellectuel, intériorisé, impalpable, mais dont les neurosciences visent à montrer la teneur somatique ? L’effort permettrait le progrès. Oui, mais lequel ? À quel prix, à quelles fins ? Faut-il nécessairement se dépasser, « s’arracher », pour être heureux ? À qui profite donc l’effort ?

Évoquer d’autres manières, moins doloristes, moins violentes, moins compétitives, moins discriminantes de penser l’effort et la performance, comme l’accomplissement et le dépassement de soi, c’est aussi poser les bases d’une écologie personnelle, qui est aussi une ergonomie de l’effort personnel et collectif, c’est-à-dire une manière de bien vivre avec soi-même comme avec les autres.